Une « grande avancée » dans la prise en charge des « plus vulnérables ». Les autorités ont inauguré, jeudi 4 février, à Paris, le premier centre d’hébergement d’urgence pour les jeunes migrants, qui attendent que la justice reconnaisse ou non leur statut de mineurs isolés étrangers. Depuis le 20 décembre, vingt-quatre sont hébergés dans le centre inauguré officiellement jeudi dans le 15e arrondissement de Paris. L’ancien bâtiment de bureaux, qui peut accueillir quarante personnes, est mis à disposition par la Ville jusqu’à la mi-2022.
Le sort de ces jeunes, déterminés majeurs par les départements franciliens mais qui ont déposé des recours pour faire valoir leur minorité et obtenir une prise en charge par l’aide sociale à l’enfance (ASE), fait l’objet d’un bras de fer depuis des années entre Paris, l’Etat et les organisations non gouvernementales (ONG) qui les défendent.
« Cela faisait deux ans que nous demandions à l’Etat [qui finance le fonctionnement du centre] l’ouverture de lieux adaptés pour prendre en charge les jeunes les plus vulnérables » en recours devant un juge des enfants, a déclaré Dominique Versini, adjointe à la Maire de Paris chargée de la protection de l’enfance, lors d’une visite. « C’est une première et la Ville de Paris est prête à continuer » à ouvrir ce type de centres, a-t-elle poursuivi, évoquant une « grande avancée » pour ces personnes qui dépendent autrement du numéro d’urgence 115 pour les sans-abri, souvent saturé.
« Un besoin aigu »
Le lieu « répond à un besoin aigu en Ile-de-France et à Paris en particulier, pour la mise à l’abri et la prise en compte sociale d’un public spécifique », s’est félicitée Magali Charbonneau, de la préfecture d’Ile-de-France. Le centre offre « un cadre accueillant et sécurisant », qui permet aux jeunes « de pouvoir enfin se poser » et poursuivre, la plupart du temps, une scolarité, a expliqué le directeur des lieux pour la Fondation de l’Armée du salut, Louis Ngwabije.
Bakary, un Sénégalais qui affirme avoir « bientôt 17 ans », est l’un des seuls à ne pas aller à l’école. Il garde « espoir que sa situation se débloque » : « Quand je suis arrivé en 2020, on m’a dit que je n’avais pas assez de preuves pour ma minorité, parce que j’avais perdu mes documents en traversant la Méditerranée. Mais maintenant on a fait venir des documents du pays. » En attendant, il a un toit sur la tête, remercie-t-il, après avoir connu la rue pendant le premier confinement, puis trois mises à l’abri dans des gymnases parisiens.
« C’est bien qu’ils aient ouvert un lieu, mais ça ne correspond absolument pas à l’ampleur du problème », s’est inquiétée Corinne Torre, responsable en France de Médecins sans frontières (MSF), une des ONG militant depuis des années pour que ces jeunes bénéficient tous de la « présomption de minorité » le temps du recours, qui dure un an en moyenne, et qu’ils soient hébergés. « On demande un vrai dispositif avec un accompagnement pluridisciplinaire », notamment médical, insiste MSF. En 2020, environ cinq mille jeunes migrants ont vu leur âge évalué à Paris, où seuls 30 % d’entre eux sont reconnus mineurs.